Certains employeurs semblent abuser du régime auto-entrepreneur qui leur permet de faire travailler à moindre frais. En effet, salarier une personne revient à payer des charges et cotisations sociales de l’ordre de 50%, alors qu’engager un auto-entrepreneur permet de ne payer que ce qu’il facture !
Il y a 3 conséquences à ce type de pratiques abusives :
- Du point de vue de l’employeur il y a un gain financier important car les auto-entrepreneurs n’évaluent souvent pas leurs tarifs en fonction des charges qu’ils auront eux-même à payer.
- Du point de vue de l’URSSAF cela peut-être considéré comme du salariat déguisé en sous déclaration de cotisations sociales, étant donné que les charges à payer pour un auto entrepreneur en prestations de service sont inférieures à 25% de ce qu’il encaisse !
- Enfin, du point de vue de l’ « auto-entrepreneur », cette situation porte atteinte aux droits essentiels de son statut de travailleur salarié au regard de ses conditions de travail, de rémunération, mais aussi de la protection sociale…
Certains employeurs n’hésitent pas à inciter leurs employés ou intérimaires à s’inscrire en auto-entrepreneur pour exploiter au maximum cette brèche et payer le moins de charges possibles, mais comme nous le rappelons régulièrement, cela peut être considéré comme du salariat déguisé et requalifier en contrat salarié dans de nombreux cas :
- Si l’auto-entrepreneur travaille uniquement pour le même « client »
- Si l’auto-entrepreneur travaille dans les locaux du « client » et utilise le matériel mis à disposition par ce client.
- S’il existe un lien de subordination entre le client et l’auto-entrepreneur…
- Si l’auto-entrepreneur était précédemment salarié et effectue le même travail.
- Etc…
Le risque pour l’employeur qui abuse de ce type d’astuce est de voir les contrat requalifiés, de devoir payer des cotisations à l’URSSAF sur les prestations passées, et de devoir payer de lourdes amendes en plus !
Un exemple d’abus du statut d’auto-entrepreneur contrôlé par l’URSSAF :
Le magazine Challenges rapporte un exemple tout récent dans lequel la société Acadomia, leader du soutien scolaire en France, a été contrôlée et épinglée pour avoir incité une partie de ses enseignants à prendre le statut auto entrepreneur pour les payer, ce qui permettait de payer moins de charges sociales :
Les contrôleurs de l’Urssaf ont dressé un procès verbal de « travail dissimulé » et de « salariat déguisé en sous déclaration » de cotisations sociales. Acadomia va devoir verser à l’administration un redressement de cotisations sociales, et il est probable que le dossier soit transmis à la justice car le « travail dissimulé » constitue une infraction pénale !
Que risque un auto-entrepreneur en cas de contrôle URSSAF pour travail dissimulé par son client « employeur » ?
Un salarié embauché sans être déclaré comme tel (par exemple en auto-entrepreneur) n’est pas considéré comme coupable, mais comme victime au sens du Code du Travail.
Articles L5426-2 et L8261-1 et -2 du CT :
Le salarié non déclaré ne peut pas être tenu responsable de sa situation, sauf dans le cas où — et avec la connivence de son employeur — il a volontairement choisi de ne pas être déclaré ou d’être payé en espèce et sans bulletin de paie afin de percevoir indûment des revenus de remplacement, ou de cumuler illicitement un autre emploi.
Article L8223-1 CT :
« En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ».
Le statut d’autoentrepreneur a engendré un tel engouement que certaines entreprises en ont clairement abusé, privant certaines personnes d’un véritable statut de salarié avec la protection de l’emploi, une rémunération fixe assurée et une véritable protection sociale. Ce sont ces pratiques abusives (et certainement aussi le besoin de remplir les caisses de l’état) qui ont poussé l’Etat a renforcé les contrôles des auto-entrepreneurs via une opération pilotée par la DNLF (Délégation Nationale à la Lutte contre la Fraude) et menée par l’URSSAF dans toute la France.
D’autres articles à lire pour aller plus loin sur ce sujet :
Une question : peut-on imposer à un auto entrepreneur une durée de travail l’empêchant ainsi d’effectuer d’autres tâches pour un autre client ?